[PAROLES DE PRO] “Nous allons être nombreux à changer de méthodes de travail et de canaux de réservation” confie une conseillère en voyages

#JesuisAgentdeVoyages

8 avril 2020 – Vous êtes nombreux à avoir des choses à dire, à vouloir partager avec d’autres professionnels votre réalité, vos défis, votre optimisme, alors nous vous donnons la parole. Vous pouvez nous envoyer votre témoignage écrit, podcast ou vidéo pour partager votre quotidien, votre défi du jour ou votre bon coup avec d’autres professionnels. Nous publierons quotidiennement l’un de vos messages dans notre infolettre du jour.

Aujourd’hui, nous vous partageons une lettre ouverte de Claudine Lussier, conseillère en voyages pour Action Voyages. Si vous aussi, vous souhaitez partager avec l’industrie votre quotidien, consultez la page ICI pour les détails.

Dans sa lettre ouverte, Claudine veut rappeler que l’année avait bien, même très bien commencé. Une pointe de nostalgie quand on repense à l’euphorie de ce début d’année qui semblait prometteur pour de nombreux professionnels. 2020 devait porter chance, c’est avec cet élan que nous avons tous aborder ce début d’année sans s’imaginer qu’un virus plus petit qu’un grain de sable viendrait bloquer la machine. Puis viennent aussi les premières conclusions de cette crise. La COVID19 changera aussi la relation que les agents ont avec les tours opérateurs selon Claudine. Est-ce que certains acteurs seraient de trop dans l’équation?

LETTRE OUVERTE DE CLAUDINE LUSSIER

(8 avril 2020)

“L’année 2020 s’annonçait record. Des chiffres de ventes en Janvier et Février jamais vu ! Puis, arriva Mars…

Le métier de conseiller voyages faisait déjà face à de sérieux enjeux depuis plusieurs années ; baisse de commission des tours opérateurs, hausse constante des « taxes et frais de service », tarifs nets concurrentiels de plus en plus rares … Bref, nous avions déjà plusieurs « batailles » à mener de front pour être rémunéré à notre juste valeur, ou plutôt, de façon décente.

J’ai de nombreuses interrogations sur la suite.

Qu’en sera-t-il quand notre industrie sera en mesure de reprendre du service ? Est-ce que voyager deviendra un produit de luxe réservé uniquement au mieux nantis ? Est-ce que les compagnies aériennes et les tours opérateurs tenteront de regagner les pertes encourues en affichant des prix de ventes astronomiques ?

Est-ce qu’au contraire, ils tenteront d’attirer la clientèle en offrant des tarifs alléchants pour faire « repartir la machine » ? Décideront-ils de « couper » là où ils peuvent ? C’est-à-dire, dans nos commissions, encore ?

Auront-ils plutôt vu notre valeur et la difficulté qu’ils ont eu à gérer le consommateur directement?

En conséquence, décideront-ils de revenir à des taux de commissions satisfaisants ? ( laissez-moi rêver !!)

Une chose est certaine, nous allons être nombreux à changer de méthodes de travail et de canaux de réservation.

Après discussions avec plusieurs collègues et acolytes, deux points sont clairs pour l’avenir : Il y aura le moins d’intermédiaire possible dans un dossier et… il y aura des frais de service (pour ceux qui n’en chargeaient pas déjà), non négociable!

Les dossiers que j’ai eu à traiter pour lesquels j’avais réservé directement auprès des lignes aériennes, des croisiéristes, des hôteliers, ont été beaucoup moins pénible à gérer.

Certains tours opérateurs et consolidateurs se sont brillamment démarqués dans cette crise, d’autre ont littéralement creuser leur tombe. C’est du moins mon avis.

Je ne vous apprends rien si je parle d’heures interminables d’attente en ligne chez certains consolidateurs et tours opérateurs, des réponses vagues, des retours de courriels inexistants, des mauvaises informations, des pénalités plus restrictives qu’il se devrait… Mais dites-moi pourquoi ? Pourquoi alors continuerais-je à faire affaire avec une compagnie qui non seulement ne me rapporte qu’un minimum de commission, ne me procure aucun service à la clientèle digne de ce nom mais qui en plus, fait en sorte que le consommateur aurait été privilégié en réservant lui-même directement chez le croisiériste ou la ligne aérienne par exemple. ( Si ÇA, ce n’est pas se tirer dans le pied…)

Est-ce que certains tours opérateurs et consolidateurs se retrouveront au « banc des accusés » comme nous l’avons été, conseillers en voyages, pendant plusieurs années suite à l’avènement d’internet ?

Il n’y a pas si longtemps, la question qui était sur toutes les lèvres, du côté des consommateurs était : « Mais, pourquoi je ferais affaire avec une agence de voyage ? »

Sera-t-elle maintenant remplacée, par une question provenant des conseillers voyages : «  Mais pourquoi je ferais à nouveau affaire avec un tour opérateur ou un consolidateur alors que je peux passer directement par le fournisseur de service, être commissionnée, avoir accès direct à mon dossier et charger mes frais de service ? »

Durant cette crise, j’en suis convaincue, le consommateur a compris notre plus-value à nous, les conseillers. Est-ce que tous les autres acteurs de l’industrie ont réussi à nous démontrer la leur ? Permettez-moi d’en douter.

Je comprends qu’il s’agit d’une crise sans précédent, qui a frappé de plein fouet. Je comprends que personne n’était prêt. Je comprends aussi que les enjeux économiques sont gargantuesques et qu’aucune entreprise n’avait de marche à suivre ou de référence. Je suis certaine que tous les partenaires ont fait de leur mieux mais je crois aussi que cette crise nous donnera l’opportunité de prendre les devants à plusieurs niveaux. La crise apportera un vent de changement, à nous de décider quelle direction il prendra. 

Se pourrait-il que nous nous retrouvions éventuellement, nous, conseillers voyages, avec ce qu’on appelle communément « le gros bout du bâton ? »

Peut-être que oui.

Peut-être que non.

Ce sera à NOUS de voir…

 

Auteur: Claudine Lussier