5 questions à Mélanie Paul-Hus, d’Atout France

Dans le cadre de la tournée Destination France, nous avons rencontré Mélanie Paul-Hus, directrice d’Atout France au Canada, et nous en avons profité pour lui poser quelques questions. Entrevue-éclair.


Profession Voyages : Par les temps qui courent, on sent que les Québécois et les Canadiens sont toujours plus en rogne contre les États-Unis, et qu’ils ont plus que jamais envie de bouder le pays de l’oncle Donald. La France en tirera-t-elle parti?

Mélanie Paul-Hus : J’ai confiance que comme solution de remplacement aux États-Unis, les gens vont se tourner vers l’Europe. Avant même que Trump soit élu, les dernières statistiques de la Commission européenne du tourisme faisaient état d’une certaine appétence pour le Vieux-Continent. Et là, je pense que ce qu’on vit [NDLR, c’était avant la rencontre Trump/Vance-Zelensky] donne vraiment envie de se tourner vers l’Europe, y compris la France bien sûr, mais aussi la Martinique et la Guadeloupe.

Dans ces derniers cas, les gens ont droit à un style de voyage européen de ce côté-ci de l’Atlantique, en plus de payer en euros alors que le taux de change pour le dollar canadien n’est pas favorable aux États-Unis. À cet égard, l’annualisation du vol Montréal – Fort-de-France d’Air Transat arrive d’ailleurs à point nommé.

 

PV : À quoi doit-on s’attendre en France l’été prochain, comme nouveautés, événements spéciaux ou façons d’aborder le tourisme?

MPH : À beaucoup de choses, dont l’année Cézanne, à Aix-en-Provence – c’est leur artiste emblématique – et le millénaire de Caen, en Normandie. À Paris, nous continuons à profiter de l’élan engendré par la réouverture de Notre-Dame-de-Paris – où les gens se bousculent pour redécouvrir la cathédrale –, mais sinon, nous sommes déjà tournés vers les Jeux Olympiques d’hiver de 2030. Ça rejoint l’idée, ces dernières années, que la France fait beaucoup d’efforts pour accueillir les grands événements comme les JO.

En même temps, nous poursuivons ce que nous avons commencé à faire il y a plusieurs années : favoriser la mobilité douce, mais aussi allonger les séjours. Il y a des marchés (pas nécessairement le Canada) où les gens ne voyageaient que lors de périodes très précises et qui avaient un impact un peu négatif sur certaines destinations; tout ça est en train d’être revu. Et puis, la concurrence est féroce, alors il nous faut aussi nous démarquer.

Enfin, nous développons toujours plus, d’année en année, le label Tourisme et handicap, pas seulement pour faciliter l’accès à ceux qui en ont besoin, mais aussi pour créer des expériences qui s’adressent à eux. C’est un gros projet! Une partie de notre siège à Paris s’en occupe, c’est très technique, mais aussi très important pour nous.

 

PV : Et qui sont ces concurrents?

MPH : D’un point de vue mondial, c’est bien sûr notre voisin, l’Espagne, et d’un point de vue canadien, c’est le Royaume-Uni. Au Québec, les États-Unis forment un concurrent de taille; viennent ensuite l’ Italie, puis l’Espagne plus loin. Mais nous devons toujours demeurer attentifs aux tendances et deviner ce que les clients vont vouloir dans quatre ans.

 

PV : Cette année, Montréal a perdu Corsair mais a hérité de French Bee. Comment s’annonce cette nouvelle liaison?

Elle s’annonce très bien : lors de la conférence de presse du 29 janvier dernier à Montréal, French bee dévoilait que la prévente se déroulait au-delà de ses espérances. Pas moins de 15 000 sièges avaient déjà été vendus, ce qui est plus que la prévente sur New York, lorsque le transporteur a entamé sa liaison sur cette ville.

La capacité de French bee devrait être assez semblable à celle de Corsair, avec des appareils qui proposent 411 sièges (376 en classe économique et 35 en classe premium); si la demande est là, on envisage même d’utiliser des appareils de 450 sièges.

French bee vise du gros volume et une clientèle jeune, étudiante, mais aussi des expats, des PME et de nouveaux visiteurs français. Mais contrairement à Corsair, French bee compte relier Montréal et Paris toute l’année.

 

PV : En 2024, la France a accueilli 100 millions de touristes, un record. Comment peut-on maintenant aller plus loin?

MPH : Il y a plusieurs nouveaux sites qui se développent, mais aussi des villes dites « secondaires » qui gagnent en notoriété, et qu’on aurait peut-être dénigrées autrefois.

Par exemple, Nîmes a été la seule ville française plébiscitée par le New York Times dans sa liste des meilleures destinations à voir en 2023, alors que Perpignan monte dans le palmarès des villes les plus attirantes pour les Français. Pour sa part, Dijon se fait de plus en plus valoir comme porte d’entrée de la Bourgogne.

Dans ce dernier cas, même si Dijon promeut sa destination depuis longtemps, on les connaît moins au Québec car ce marché n’était pas une de leurs priorités, jusqu’ici. Ça va changer cette année : ils nous dévoilent leur offre, nous parlent de leurs chefs et de leurs producteurs… C’est ainsi que les destinations se construisent. D’ailleurs c’est ça, l’essence de la France : il y a toujours quelque chose de nouveau. Toujours.

 

PV : Et que voyez-vous comme destinations émergentes, dans votre boule de cristal?

MPH : On sent le retour du Grand Est (Alsace, ex-Lorraine et Champagne) et de tout le potentiel que représente cette région. En 2028, Bourges sera aussi l’une des trois capitales européennes de la culture, une nomination qui donne en général un bon coup de projecteur sur une destination.

De plus en plus, on parlera aussi des Alpes du Sud, avec les JO d’hiver qui s’en viennent. Ceux qui ne le savent pas encore vont réaliser à quel point il est facile de naviguer entre cette région et la Côte d’Azur, ce qui bénéficiera au tourisme dans cette partie de la France, été comme hiver.