Un projet de loi soumis au vote aujourd’hui a de très fortes chances d’être adopté, vu la supermajorité des démocrates dans les deux chambres de l’État.
Dans une initiative inédite, les législateurs d’Hawaï s’apprêtent à augmenter une taxe imposée aux voyageurs séjournant dans des hôtels et d’autres hébergements de courte durée, et à consacrer les nouvelles recettes à des programmes de lutte contre le réchauffement climatique.
Les responsables de l’État affirment que les fonds seront utilisés pour des projets tels que l’ajout de sable sur les plages en érosion, l’aide aux propriétaires pour l’installation de fixations contre les ouragans sur leurs toits et l’élimination des herbes envahissantes comme celles qui ont alimenté l’incendie meurtrier ayant détruit Lahaina, il y a deux ans.
Projet de loi en cours
Le projet de loi soumis au vote de la Chambre et du Sénat, ce mercredi, ajouterait 0,75 % à la taxe sur le tarif journalier des chambres à partir du 1er janvier. Il est presque certain qu’il sera adopté, les démocrates détenant une supermajorité dans les deux chambres et les dirigeants du parti ayant approuvé la mesure. Le gouverneur Josh Green a déclaré qu’il approuverait la loi.
Les autorités estiment que cette augmentation générerait environ 100 millions $US de recettes annuelles. « Nous avons connu une tragédie de 13 milliards de dollars à Maui et perdu 102 vies humaines, dit Josh Green. Ce genre de fonds nous aidera à prévenir la prochaine catastrophe ».
Le gouverneur Green assure qu’Hawaï est le premier État du pays à prendre une telle mesure. Andrey Yushkov, analyste principal à la Tax Foundation, une organisation à but non lucratif basée à Washington, confirme ne pas connaître d’autres États qui consacrent une partie des revenus de la taxe sur les hébergements à la protection de l’environnement ou à la lutte contre les changements climatiques.
Une taxe lourde qui s’alourdit encore
Cette augmentation s’ajoutera à une taxe déjà relativement élevée sur les séjours de courte durée. La taxe actuelle de l’État d’Hawaii, de 10,25 % sur les tarifs journaliers, passerait ainsi à 11 %.
En outre, chaque comté d’Hawaï ajoute sa propre surtaxe de 3 %, et l’État et les comtés appliquent une taxe générale de 4,712 % sur les biens et services, y compris les chambres d’hôtel. Au total, le taux d’imposition atteindra près de 19 %.
Les seules grandes villes états-uniennes qui comptent des taux de taxe cumulés sur les hébergements supérieurs sont Omaha, dans le Nebraska (20,5 %), et Cincinnati (19,3 %), selon un rapport de 2024 du cabinet conseil HVS.
Le gouverneur soutient depuis longtemps que les 10 millions de visiteurs annuels devraient contribuer à aider les 1,4 million d’habitants à protéger l’environnement. Il pense aussi que les voyageurs accepteront cette augmentation car elle permettra à Hawaï de « garder des plages parfaites » et de préserver des lieux emblématiques comme la route de Hana à Maui et le littoral de la côte nord d’Oahu.
Après les incendies de Maui, Josh Green affirme avoir reçu des milliers de messages de soutien de tout le pays. Cette taxe est un moyen concret pour les visiteurs d’aider, dit-il.
L’industrie hôtelière divisée
Jerry Gibson, président de la Hawaii Hotel Alliance, qui représente les opérateurs hôteliers de l’État, considère que le secteur était soulagé que les législateurs n’aient pas adopté une hausse encore plus élevée, qui avait été initialement proposée.
« Je ne pense pas que qui que ce soit dans l’industrie du tourisme dise : ‘Taxons davantage.’ Personne ne souhaite cela, dit-il. Mais notre État, en même temps, a besoin d’argent. » Le côté positif, selon lui, est que cet argent servira à embellir l’environnement d’Hawaï.
Hawaï a depuis longtemps du mal à financer les besoins de protection environnementale et de conservation de ses îles, que ce soit à l’égard des récifs coralliens, de l’élimination des plantes invasives ou de la préservation de la faune, comme les phoques moines hawaïens. L’État doit également entretenir un vaste réseau de sentiers, dont plusieurs subissent une fréquentation accrue avec l’essor de la randonnée.
Il y a deux ans, les législateurs ont envisagé d’imposer aux touristes un permis journalier ou annuel pour accéder aux parcs et sentiers d’État. Le gouverneur Green souhaitait ainsi faire payer 50 dollars à chaque visiteur pour entrer dans l’État, une idée que les parlementaires ont jugée contraire à la Constitution américaine qui garantit la liberté de circulation. L’augmentation de la taxe hôtelière est donc un compromis, rendu plus pressant par les incendies de Maui.
Un important déficit de financement
Le groupe de défense Care for Aina Now estime que les besoins de financement en conservation de l’État dépassent de 561 millions de dollars les dépenses annuelles.
Josh Green reconnaît que les recettes générées par la hausse de la taxe ne combleront pas ce déficit, mais indique que l’État émettra des obligations pour tirer parti des fonds collectés.
La majeure partie des 100 millions de dollars serait consacrée à des mesures pouvant être mises en œuvre en un ou deux ans, tandis que 10 à 15 millions serviraient de soutien aux obligations pour des projets d’infrastructure à long terme.
Pour justifier cette taxe, Kāwika Riley, membre de l’équipe consultative sur le climat du gouverneur, a évoqué un proverbe hawaïen : « Étranger seulement pour un jour », qui signifie qu’un visiteur doit contribuer au travail après sa première journée en tant qu’invité.
« Personne ne dit littéralement que nos visiteurs doivent venir ici pour travailler pour nous, dit-il. Mais ce que nous disons, c’est qu’il est important de faire partie de la solution et qu’il est important de participer à la préservation des choses que vous aimez. »