L’entente sur laquelle les pilotes voteront prévoit une hausse salariale moyenne de plus de 60 % sur cinq ans.
Une entente de principe a permis d’importants gains salariaux pour les pilotes d’Air Transat, après près d’un an de négociations et dix jours consécutifs de pourparlers intensifs, où les salaires ont été le principal point d’achoppement.
L’accord annoncé mardi soir a de justesse évité un arrêt de travail coûteux pour Transat A.T. inc., propriétaire de la compagnie aérienne de loisirs en difficulté, ainsi qu’un sérieux contretemps pour des milliers de voyageurs à l’approche du congé des Fêtes.
L’entente sur laquelle les pilotes voteront dans les prochaines semaines prévoit une hausse salariale moyenne de plus de 60 % sur cinq ans, selon la porte-parole de Transat, Andréan Gagné.
Cela représente aussi plus de 100 000 dollars supplémentaires par année pour la plupart des commandants d’ici 2030, a-t-elle précisé.
Transat n’a pas voulu fournir plus de détails sur la rémunération ou sur l’ensemble de la convention collective avant la ratification. « Nous ne dévoilons pas où nous avons atterri », a indiqué Andréan Gagné.
Pilotes de lignes dans la même ligue
Bradley Small, qui dirige la section Air Transat du syndicat, n’a pas confirmé ces chiffres. Mais il a affirmé que l’entente place désormais ses collègues dans la même ligue que les pilotes de WestJet et d’Air Canada, qui ont obtenu d’importantes hausses salariales en 2023 et en 2024 respectivement.
« Avant, nous étions au bas de l’échelle, et maintenant nous sommes alignés avec eux », a déclaré Bradley Small.
Les dirigeants syndicaux doivent présenter l’entente aux membres la semaine prochaine à Toronto et à Montréal, suivie d’un vote qui se terminera le 6 janvier, a-t-il ajouté.
Les salaires ont été le principal obstacle au cours des derniers jours, la plupart des autres enjeux comme les horaires, l’assurance et les avantages ayant été réglés, selon les deux parties. Il ne restait plus que la rémunération.
« Les dernières heures portaient surtout sur ces augmentations », a expliqué Andréan Gagné. « Et nous avons comblé l’écart. »
« Nous avons été créatifs sur certaines façons de structurer l’entente et d’aider aussi la compagnie », a ajouté Bradley Small. « Nous savons qu’elle est fragile. »
Celui-ci a indiqué que son équipe de négociation a serré la main de la PDG de Transat, Annick Guérard, et d’autres dirigeants peu avant 19 h mardi dans un hôtel du centre-ville de Montréal, en présence de trois conciliateurs fédéraux. L’atmosphère dans la salle, « murs blancs, rien de spécial », a aussitôt changé, a raconté Andréan Gagné.
L’équipe de Transat s’est sentie « soulagée », a-t-elle dit. « Soulagée et heureuse de revenir à la normale pour nos clients. »
Situation délicate
L’affrontement est survenu à un moment particulièrement délicat pour Transat, qui tente de gérer une lourde dette, de dégager un bénéfice annuel pour la première fois depuis 2018 et de repousser une tentative de prise de contrôle par un investisseur activiste.
La semaine dernière, le magnat des médias Pierre Karl Péladeau — deuxième actionnaire de Transat avec 9,5 % des actions — a réclamé une réorientation stratégique et un remaniement du conseil d’administration qui lui accorderait, à lui et à deux alliés, des sièges à la table.
L’entente de mardi a évité une nouvelle vague d’annulations de vols. Dix-huit vols avaient déjà été supprimés par précaution avant l’échéance de la grève prévue mercredi matin par l’ALPA, qui représente les 750 pilotes d’Air Transat.
Les vols annulés comprenaient notamment des destinations au Mexique, dans les Caraïbes et au Pérou, ainsi qu’à Londres, Paris, en Espagne et au Portugal.
Les 18 vols étaient tous au départ ou à destination de Toronto ou de Montréal, et prévus pour mardi ou mercredi.
Des négos coriaces
Au cours de la semaine et demie précédente, les deux parties avaient régulièrement négocié jusqu’à environ 2 h du matin à mesure que les discussions s’intensifiaient, les négociateurs étant répartis sur trois salles de conférence à différents étages, selon des responsables de Transat et de l’Association des pilotes de ligne.
Un terrain d’entente sur les salaires a commencé à émerger lundi, mais, aux petites heures du matin, les équipes de négociation avaient besoin d’une pause.
« Quand on parle de négocier des centaines de millions de dollars, il faut être très vigilant pour ne pas commencer à prendre des décisions folles ou impulsives », a expliqué Bradley Small.
Le conflit de travail aurait marqué la troisième grève en un an et demi dans le secteur aérien au Canada, alors que les travailleurs cherchent à obtenir des gains comparables à ceux réalisés ailleurs en Amérique du Nord dans un contexte de hausse du coût de la vie.
Des hausses significatives
L’an dernier, les pilotes d’Air Canada ont obtenu une augmentation salariale de près de 42 % sur quatre ans. Cette hausse dépasse les importants gains obtenus l’année précédente par les pilotes des trois plus grandes compagnies aériennes états-uniennes, où les augmentations variaient entre 34 % et 40 %, même s’ils partaient d’une base plus élevée.
En supposant que les pilotes travaillent environ 75 heures par mois, une norme courante dans l’industrie, les nouveaux pilotes d’Air Canada gagnent entre 75 700 et 134 000 dollars, contre près de 187 000 dollars à la cinquième année, et plus de 367 000 dollars pour un commandant expérimenté pilotant un Boeing 777.
En 2023, les pilotes de WestJet ont obtenu une hausse de 24 % sur quatre ans.