[ENTREVUE] OPC: Pourquoi les réponses du gouvernement tardent à venir pour les professionnels du voyage et les voyageurs?

 

5 mai 2020 – Les conseillers en voyages ainsi que tous les professionnels de l’industrie et les consommateurs attendent des réponses et des précisions de la part de l’Office de la Protection du Consommateur concernant les crédits voyages ou les recours possibles avec le FICAV. Bien que l’Office de la Protection du consommateur travaille fort actuellement, les réponses tardent à arriver. Rappelons par exemple, qu’en France, le gouvernement a statué sur la question des crédits voyages 10 jours après la mise en place des restrictions de voyage, et que pour le Québec le compteur monte presque à 2 mois, alors que TICO en Ontario a déjà aussi rendu ses conclusions sur la question. La rédaction de Profession Voyages à chercher à savoir pourquoi cela prenait-il autant de temps.

Nous avons contacté plusieurs ministères. Voici la réponse officielle obtenue auprès de l’attachée de presse de la ministre LeBel, ministre responsable de la protection du consommateur.

“La question du remboursement des voyages aux consommateurs par les acteurs de l’industrie du voyage fait actuellement l’objet d’analyses. Notre gouvernement est conscient du désir des consommateurs de se faire rembourser mais aussi des réalités des acteurs de l’industrie, petits et grands, qui nous disent vivre des difficultés financière. Plusieurs ministères sont au travail. Les ministres LeBel, Fitzgibbon, Proulx et Girard travaillent ensemble sur un plan de relance économique et évaluent différents scénarios” explique Nicky Cayer, Attachée de presse du Cabinet de la ministre Sonia LeBel

Nous nous sommes donc à nouveau tournés vers l’Office de la protection du consommateur , qui ne l’oublions pas reste un organisme gouvernemental qui doit régir l’industrie du voyage, mais aussi les restaurants, les gyms, ect. L’équipe au gouvernement reste très coopérative avec les professionnels du voyage et les médias en fournissant les informations dont ils disposent actuellement, c’est-à dire-malheureusement pas grand-chose pour faire avancer l’industrie, mais la bonne volonté est là. Nous avons interrogé Charles Tangay, Responsable des partenariats stratégiques et des relations avec les médias à l’OPC pour tenter d’en savoir plus. 

À la lecture de ses réponses, on comprend que les défis sont nombreux et que l’industrie du voyage est un beau sac de noeuds impliquant de nombreux acteurs et quelques zones d’ombre. Il semble au final difficile de faire un choix idéal pour le gouvernement, car la situation est d’une rare complexité.  Tout ceci laisse paraître que le gouvernement n’est pas à l’aise avec ce domaine.

Dans cette entrevue, on apprend notamment que seulement 60% du fond peut être utilisé pour un événement. La pandémie étant considérée comme un seul événement. On y découvre aussi que l’argent du fond est placé sur les marchés financiers et comme vous le savez l’heure n’est au profit du côté de la bourse en ce moment. Moscou Côté nous avait précisé que bien que l’argent soit placé par la Caisse de dépôt, la Caisse n’était pas solidaire du fond. Alors, que reste-t-il vraiment dans le fond du FICAV pour éventuellement indemniser les consommateurs mécontents du crédit?

Lors de notre web conférence sur le groupe Facebook des professionnels du voyage en compagnie des représentants de l’AAVQ et de l’ACTA, nous avons même fait des calculs rapides pour estimer ce qu’un client, avec la réglementation en vigueur en ce moment, pourrait obtenir s’il faisait une demande au FICAV. Pour voir cette entrevue, cliquez ICI. Nous avions convié l’OPC à cette conférence, qui n’a pas souhaité nous rejoindre, mais a néanmoins accepté notre demande d’entrevue.

ENTREVUE AVEC CHARLES TANGAY

Profession Voyages: Pourquoi l’officialisation des obligations des professionnels envers leurs clients ainsi que les procédures officielles (remboursement vs crédit voyage) mettent tant de temps à venir?

Charles Tanguay: Des discussions ont cours avec différents interlocuteurs sur toute la question des crédits voyage. Les enjeux sont importants et complexes. L’Office espère faire le point prochainement à ce sujet.

(Note de la rédaction: pas de nouvelles depuis cette entrevue le 22 avril.)

Profession Voyages: Pour que l’on comprenne bien, quels sont les défis que rencontre l’OPC actuellement concernant l’industrie du voyage et qui ne permettent pas de rendre des conclusions et directives aussi vite qu’en France par exemple?

Charles Tanguay: L’Office a fait un portrait de la situation et des options qui peuvent être choisies par le gouvernement. Ces éléments, qui font partie du processus décisionnel, ne sont pas de nature publique et l’Office n’a pas l’intention d’en débattre publiquement.

Profession Voyages: Est-ce que l’un des défis est qu’il n’y a pas assez d’argent dans le fond pour rembourser les voyageurs?

Charles Tanguay: Il est impossible pour le moment d’estimer le nombre et la valeur des réclamations liées à la COVID-19. Le total des demandes concernant le COVID reçues au 31 mars était de 2 276. Elles peuvent porter sur des voyages passés ou à venir.

Comme l’article 43.3 du Règlement sur les agents de voyages prévoit un plafond d’indemnisation global de 60% de la valeur totale du Fonds à la fin du dernier exercice financier pour un même événement – ici, les conséquences de la pandémie – et considérant qu’il s’agit ici d’une situation sans précédent, l’Office et le gouvernement du Québec devront suivre la situation pour déterminer si les sommes dont dispose le FICAV seront suffisantes pour indemniser tous les clients des agents de voyages du Québec et sinon, quelles seraient les options possibles pour faire face à cette situation extraordinaire.

Par ailleurs, Le Fonds est déposé à la Caisse de dépôt et placement du Québec. Ses rendements sont influencés par les fluctuations des marchés financiers, qui sont eux-mêmes soumis actuellement à des turbulences liées aux conséquences de la pandémie sur l’économie mondiale.

Profession Voyages: Qui peut faire une demande au FICAV? Tous les voyageurs ayant réservé avec un conseiller en voyages ? Qu’en est-il de ceux qui ont réservé en direct avec Sunwing ou Transat par exemple, ont -ils le droit également d’être indemnisés?

Charles Tanguay: Tous les clients d’un agent de voyages titulaire d’un permis du Québec peuvent réclamer au FICAV le coût des services touristiques qu’ils ont payés à leur agent et qu’ils n’ont pas pu obtenir.

(Note de la rédaction: cela inclut dont les clients qui ont fait des réservations directement auprès de Voyages Transat, VAC… car leurs agents ont des permis)

Profession Voyages: Des rumeurs de piratages ont été lancées au sujet du FICAV, est- ce vrai ? Que recommandez-vous si les clients veulent faire une demande?

Charles Tanguay: L’Office n’a aucune indication qui pourrait laisser croire qu’un piratage de données des clients qui ont fait parvenir leur réclamation par courriel ait pu avoir lieu, soit, selon le sens commun donné à ce mot, un accès illégal à un système informatique depuis un ordinateur distant. L’Office reconnait que la transmission par courriel peut comporter des risques pour la sécurité de l’information, mais ce risque n’est présent qu’au moment de la transmission des informations. À ce jour, aucun cas d’interception de données n’a été rapporté. Par ailleurs, tel que mentionné dans l’article, les clients des agents de voyages peuvent à nouveau envoyer leurs documents par la poste. L’Office et PricewaterhouseCoopers travaillent à mettre en place une solution en ligne sûre et efficace.

Profession Voyages: Quel message aimeriez-vous faire passer aux conseillers en voyages qui se sentent “oubliés” et qui attendent désespéramment des réponses. Comment pourriez-vous rassurer les conseillers qui ont des difficultés avec leurs clients car ils ne sont pas en mesure ni de rembourser, ni d’informer sur les procédures finales et options offertes pour leurs voyageurs?

Charles Tanguay: L’Office invite les agents et les conseillers à prendre connaissance des communications qui leur ont été envoyées jusqu’à présent et qui leur seront envoyées, dès que des éléments nouveaux seront connus. Entre-temps, les employés du Service des permis sont en poste et peuvent répondre aux questions par courriel. Comme il s’agit d’une situation sans précédent et que le domaine du voyage est touché de plein fouet, l’Office reçoit un très fort volume de demandes, autant de la part des consommateurs que des commerçants. Nous remercions sincèrement les acteurs de l’industrie de leur compréhension et de leur patience et vous assurons de travailler très fort pour que les choses puissent revenir à la normale le plus rapidement possible.

Nous remercions l’OPC pour cette entrevue et espérons avoir des nouvelles prochainement à vous communiquer. Au final, si nous avions un ministre dédié à l’industrie du voyage, cela aurait-il été plus rapide? Il existe bien un ministère du Tourisme au Québec, mais il ne faut pas confondre voyage et tourisme ;)