Les retards dans les aéroports états-uniens pour les avions à destination du Canada pourraient entraîner des retards supplémentaires chez nous.
Le shutdown (fermeture des activités gouvernementales) du gouvernement des États-Unis, le plus long de son histoire, a atteint un seuil critique alors que l’impasse entre républicains et démocrates se poursuivait pour une 36ᵉ journée, hier.
Ce matin, le gouvernement états-unien a même ordonné une réduction des vols pouvant atteindre 10 % dans 40 des aéroports les plus fréquentés des États-Unis, en raison de la grave pénurie de contrôleurs aériens provoquée par cette fermeture.
Selon les informations disponibles, les vols internationaux seraient exemptés de cette mesure. Les aéroports de New York, Los Angeles et Chicago figureraient sur la liste transmise ce matin aux compagnies aériennes, aux côtés de ceux d’Atlanta, Denver, Dallas, Orlando, Miami et San Francisco.
L’incertitude plane
On ignore encore combien de temps durera cette paralysie, alors que les employés fédéraux manquent une nouvelle fois de paie à l’approche d’une période achalandée dans les aéroports états-uniens.
Le réseau CNN rapporte ainsi que la fin de semaine dernière, on avait connu les pires pénuries de contrôleurs aériens depuis le début de la fermeture, le 1er octobre.
Des photos publiées sur les réseaux sociaux montrent d’immenses files d’attente dans les aéroports, tandis que les retards et les annulations de vols se multiplient.
L’aéroport intercontinental George-Bush de Houston a averti les passagers, dimanche, qu’il pourrait leur falloir jusqu’à trois heures pour passer les contrôles de sécurité en raison du manque de personnel.
Effet domino pressenti
Mais même si de nombreux Canadiens évitent de voyager aux États-Unis à cause des tarifs imposés et des menaces d’annexion de Trump, ils ne pourront peut-être pas échapper aux effets en cascade de la fermeture du gouvernement états-unis.
John Gradek, chargé de cours en gestion de l’aviation à l’Université McGill, a ainsi rappelé que le système de transport aérien nord-américain est intégré. Ainsi, des retards dans les aéroports états-uniens pour des avions à destination du Canada pourraient entraîner d’autres retards dans l’ensemble du système aérien canadien.
Mais ce n’est pas le seul problème, ajoute l’expert. « Si quelqu’un voyage du sud de l’Ontario vers l’Ouest canadien, une portion importante de ce vol survole l’espace aérien états-unien, explique John Gradek. Et les voyageurs canadiens qui se rendent au Mexique pour fuir le froid survolent eux aussi les États-Unis. »
En temps normal, le transfert entre les contrôleurs aériens canadiens et états-uniens se fait sans accroc. Mais si les contrôleurs aériens spécialisés responsables de cette portion de l’espace aérien états-unien cessent de se présenter au travail, cela pourrait compromettre les déplacements des voyageurs canadiens, prévient l’expert.
« S’il y a un ralentissement ou une réduction des capacités de contrôle aérien dans des endroits comme Albuquerque, par exemple, cela pourrait nuire à la capacité des transporteurs canadiens d’opérer dans l’espace aérien états-unien pendant leur transit — pas nécessairement à destination ou en provenance des États-Unis », ajoute-t-il.
Les partis se renvoient la balle
Républicains et démocrates continuent de s’accuser mutuellement d’être responsables de la fermeture, qui a paralysé de nombreuses agences gouvernementales, laissé des centaines de milliers de fonctionnaires en congé forcé et mis en péril les prestations alimentaires fédérales de millions d’États-Uniens.
Les républicains affirment que leur projet de loi pour prolonger le financement fédéral n’a rien de controversé, tandis que les démocrates refusent de l’appuyer s’il n’inclut pas une prolongation des prestations de soins de santé sur le point d’expirer.
Donald Trump a déclaré à l’émission 60 Minutes de CBS qu’il ne négocierait ces prestations qu’une fois le gouvernement rouvert. Le président a ajouté que les démocrates finiraient par céder.
« Je pense qu’ils n’ont pas le choix, et s’ils ne votent pas, c’est leur problème », de dire le président, fidèle à lui-même.
Le personnel aérien, un élément-clé
Le personnel des aéroports avait joué un rôle clé pour mettre fin à la première fermeture de gouvernement sous l’administration Trump — qui détenait déjà, jusqu’ici, le record du plus long shutdown — lorsque le président exigeait du Congrès un financement pour ériger un mur à la frontière américano-mexicaine.
Lors de cette fermeture de 35 jours, de la fin de 2018 au début de 2019, les employés jugés essentiels — notamment les contrôleurs aériens et les agents de la Transportation Security Administration (TSA) — avaient été contraints de travailler sans salaire. Plusieurs avaient alors commencé à s’absenter plus fréquemment, provoquant d’importants retards dans les aéroports.
Une situation similaire se reproduit aujourd’hui, alors qu’un nombre croissant d’aéroports états-uniens imposent des arrêts au sol en raison du manque de personnel.
Une pénurie pré-shutdown
Avant même la fermeture, la Federal Aviation Administration (FAA) faisait déjà face à une pénurie de contrôleurs aériens. Le 31 octobre, l’administration a publié sur les réseaux sociaux que « près de 13 000 contrôleurs aériens travaillent sans salaire depuis des semaines ».
Elle a ajouté que la moitié de ses 30 installations principales connaissaient des problèmes d’effectifs, et que près de 80 % des contrôleurs étaient absents dans les installations de la région de New York ce jour-là.
« La fermeture doit cesser pour que ces contrôleurs reçoivent le salaire qu’ils ont gagné et que les voyageurs puissent éviter d’autres perturbations et retards », indique la FAA.
Le secrétaire aux Transports, Sean Duffy, a déclaré lundi à la chaîne CNBC qu’il y avait un « grondement continu à travers le système ». Force est de croire que les perturbations de vols risquent de s’intensifier, à mesure que les contrôleurs aériens demeurent impayés.