Le tourisme nord-américain à la croisée des chemins

La coalition Beyond Borders appelle à l’action face aux nouveaux tarifs douaniers et à l’instabilité politique qui freinent la relance du secteur touristique.


La coalition Beyond Borders Tourism, une alliance regroupant des acteurs du tourisme, du commerce et d’associations des États-Unis et du Canada, lance un appel urgent à la clarté politique et à une action concertée face à la hausse des tarifs douaniers, aux récentes coupes budgétaires affectant des ONG essentielles et au soutien aux infrastructures, alors qu’une incertitude historique pèse sur les voyages transfrontaliers.

La combinaison des droits de douane, des réductions de financement, de l’imposition de nouveaux frais pour entrer aux États-Unis et de l’incertitude aux postes frontaliers mine la relance du secteur, décourage les investissements et réduit les opportunités d’échanges culturels et économiques.

« La hausse des droits de douane et les vents contraires économiques réduisent le pouvoir d’achat des consommateurs, diminuent la demande pour les vacances aux États-Unis et obligent nos membres à reconsidérer leurs projets d’investissement et d’embauche », explique Terry Dale, président de l’US Tour Operators Association.

 

Déjà des pertes immenses

« Les répercussions économiques sont immédiates et mesurables – les membres de l’USTOA rapportent déjà des pertes de millions de dollars en réservations et en revenus, certains prévoyant une baisse allant jusqu’à 11 % des dépenses des visiteurs internationaux en 2025 seulement, poursuit le président. Ces pertes entraînent des réductions d’activités, des suppressions d’emplois et des occasions manquées pour les collectivités partout au pays. »

« Les effets d’entraînement dans notre secteur sont très préoccupants, et soulignent l’urgence d’adopter des politiques claires et stables pour soutenir une économie touristique américaine florissante », de conclure Terry Dale.

 

De la nécessité d’adopter des stratégies

Plus tôt cette année, la coalition Beyond Borders avait déjà identifié la nécessité de stratégies proactives et de collaborations renforcées pour inverser la tendance et restaurer la confiance dans un secteur qui contribuait autrefois à hauteur d’environ 2,5 billions de dollars US au PIB nord-américain, soit 9 % de la production économique totale.

Aux États-Unis, le tourisme soutient près de 20 millions d’emplois, tandis qu’au Canada, 1,9 million d’emplois sont liés à l’économie touristique.

« Des milliers d’emplois sont en jeu alors que ces droits de douane néfastes freinent les flux touristiques, augmentent les coûts et menacent la subsistance de nos membres, dit Jean Hébert, directeur général de l’Association canadienne des voyagistes (CATO). Le choc économique est immédiat : les voyagistes canadiens font face à des pertes de millions de dollars en réservations et à une explosion des coûts d’exploitation, certains enregistrant des baisses de plus de 70 % dans les déplacements transfrontaliers en 2025. Si aucune mesure décisive n’est prise, nos communautés en subiront les conséquences économiques pendant des années, à mesure que les entreprises dépendantes du tourisme luttent pour survivre et que les économies locales perdent des revenus essentiels. »

 

Des effets négatifs bilatéraux

Les effets négatifs sur l’économie touristique se font sentir des deux côtés de la frontière, en plein cœur de la haute saison touristique nord-américaine.

Données clés

  • Chute des réservations de voyages : Les dépenses des touristes étrangers aux États-Unis devraient baisser de 11 % en 2025, soit une perte de 18 milliards de dollars US. Les réservations aériennes anticipées entre le Canada et les États-Unis ont chuté de plus de 70 % d’une année sur l’autre.
  • Alerte dans l’hôtellerie : De grandes chaînes hôtelières et offices de tourisme urbains anticipent une baisse importante de la fréquentation internationale (jusqu’à 6 à 7 % dans certaines villes), entraînant des révisions à la baisse des prévisions de revenus.
  • Impact sur les consommateurs : Les droits de douane font grimper le coût des produits des deux côtés de la frontière, ce qui réduit les budgets consacrés aux voyages et érode la confiance des consommateurs et des entreprises dans la planification touristique.
  • Impact régional et autochtone : Les initiatives communautaires et le tourisme autochtone sont menacés par la baisse des déplacements, les suppressions d’emplois et les reculs culturels.

 

Tristes aventures

« Le dernier sondage mondial de l’ATTA est clair : l’instabilité politique et l’incertitude des politiques gouvernementales sont vivement ressenties dans le secteur du voyage d’aventure, constate Shannon Stowell, PDG de l’Adventure Travel Trade Association.  Nos recherches montrent que 93 % des opérateurs américains et 89 % de leurs homologues internationaux anticipent des impacts négatifs pour au moins les 12 prochains mois. »

« Notre secteur tient bon pour l’instant, mais la plus grande menace reste l’incertitude – notamment sur le plan financier, sécuritaire et face aux risques de changements soudains de politiques, poursuit la PDG. Pour assurer une résilience durable, nous avons besoin d’un soutien accru, de politiques claires et d’un engagement renouvelé envers la collaboration transfrontalière. »

 

Actions requises

Tous les membres de la coalition Beyond Borders exhortent les décideurs des États-Unis et du Canada à privilégier la négociation, la transparence et la coopération transfrontalière plutôt que des mesures protectionnistes.

Les politiques commerciales et budgétaires clivantes doivent être réexaminées en faveur d’approches qui restaurent la confiance et soutiennent la subsistance de millions de personnes.

« Les économies touristiques des États-Unis et du Canada ont perdu des millions de revenus en raison de la chute spectaculaire des déplacements transfrontaliers, dit Catherine Prather, présidente de la National Tour Association. L’impact économique touche l’ensemble des communautés – des petites agences de voyages aux hôtels et restaurants locaux, en passant par les attractions emblématiques, les grandes villes et les régions rurales – dont beaucoup dépendent du tourisme transfrontalier pour survivre. »

 

Besoin de confiance

« Au-delà de la stabilité, du financement adéquat et de politiques sensées, nous devons de toute urgence restaurer la confiance mondiale en affirmant que les États-Unis demeurent une destination sûre, accueillante et inclusive, poursuit Catherine Prather. Faute de cet engagement, la viabilité à long terme de notre industrie et des communautés qu’elle soutient est gravement menacée. »

« Le tourisme en autocar est l’épine dorsale du voyage en Amérique du Nord, ajoute Fred Ferguson, président et chef de la direction de l’American Bus Association. Il génère 90 milliards de dollars par an en voyages de groupe et relie des millions de personnes à des villes dynamiques, des villages historiques et des merveilles naturelles. Notre industrie soutient 500 000 emplois et d’innombrables petites entreprises, offrant des options de voyage accessibles et durables pour tous. En tant que moteur économique, le tourisme en autocar dynamise les économies locales et enrichit les communautés. Il est essentiel que les politiques encouragent le développement du tourisme international et intérieur pour assurer la croissance durable de notre secteur. »

 

Le tourisme étudiant aussi touché

« Le voyage étudiant et chez les jeunes forme aussi l’une des pierres angulaires de l’économie touristique nord-américaine, générant des milliards de retombées économiques, soutenant des milliers d’emplois et offrant des expériences éducatives et culturelles transformatrices aux jeunes chaque année, indique pour sa part Carylann Assante, PDG de la Student and Youth Travel Association (SYTA). Ces voyages favorisent la compréhension mondiale et inspirent les leaders de demain. »

« Malheureusement, ajoute cette dernière, les nouveaux tarifs et l’instabilité économique rendent ces voyages inabordables pour de nombreuses écoles et familles. Les coûts en hausse, les programmes annulés et l’incertitude grandissante suppriment des opportunités au moment où nos jeunes en ont le plus besoin. Protéger les voyages étudiants et de la jeunesse, c’est bien plus qu’une question économique : c’est préserver l’accès à l’apprentissage, à l’échange et à l’espoir pour la prochaine génération. »

 

Et le tourisme autochtone?

« Le tourisme autochtone constitue un pont vital entre les communautés, les cultures et les économies du Canada et des États-Unis », assure Keith Henry, président-directeur général de l’Indigenous Tourism Association (ITAC).

« Ce secteur crée des opportunités pour les entrepreneurs autochtones, favorise la revitalisation culturelle et offre des expériences uniques à des millions de voyageurs chaque année. Mais la récente vague de droits de douane et l’instabilité politique grandissante menacent tout ce que nous avons construit. Les coûts en hausse et l’incertitude frappent de manière disproportionnée les entreprises autochtones, mettant en péril les emplois, les moyens de subsistance et les savoirs intergénérationnels. Pour préserver le potentiel du tourisme autochtone – pour nos communautés et les générations à venir – nos dirigeants doivent rétablir des politiques transfrontalières stables, ouvertes et collaboratives. »

 

Un tourisme entrant malmené

« Le tourisme international entrant est l’un des plus puissants leviers économiques et diplomatiques des États-Unis – mais il est mis à mal par des politiques à courte vue, l’augmentation des coûts d’entrée et une rhétorique nuisible », s’indigne Lisa Simon, PDG de l’International Inbound Travel Association (IITA).

« Nos membres observent une baisse des réservations pour l’automne et l’année 2026 en raison d’obstacles évitables comme les retards de visa, les frais excessifs et l’imprévisibilité des politiques, dit-elle encore. Ce n’est pas seulement mauvais pour les affaires – c’est nuisible à l’image mondiale des États-Unis. Nous demandons aux dirigeants américains de reconnaître le tourisme entrant comme un atout essentiel et d’agir rapidement pour restaurer la compétitivité, la clarté et la confiance. »

 

Bientôt les JO

Alors que les regards du monde se tournente vers l’Amérique du Nord pour des événements comme la prochaine Coupe du monde de la FIFA, c’est l’occasion d’accueillir les visiteurs sur nos terres et de mettre en valeur les musiciens, artistes et créateurs autochtones du Canada, des États-Unis et du Mexique », dit Sébastien Desnoyers-Picard, président-directeur général de DO-IT.

« Aujourd’hui, ces voix risquent d’être réduites au silence, déplore ce dernier. C’est plus qu’une perte culturelle – c’est une occasion économique manquée en matière de marketing, de ventes et de rayonnement mondial pour des communautés qui font déjà face à des obstacles. L’impact pourrait être profond et durable. »

 

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