Quel avenir pour la distribution de voyages en ligne?

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Les acteurs de la distribution en ligne font preuve d’une agilité sans précédent et les agences de voyages (OTA) sont principalement à l’origine des bouleversements observés. Elles figurent d’ailleurs au cœur des scénarios élaborés par Amadeus sur le futur de ce secteur.

CONSOLIDATION, DIVERSIFICATION ET DÉSINTERMÉDIATION

La croissance de la distribution de voyages en ligne est principalement due aux OTA, qui se montrent particulièrement offensives. Leur volume mondial de ventes pourrait atteindre 434 milliards de dollars américains en 2020, comparativement à 125 milliards en 2010, selon Euromonitor. Des mouvements de consolidation et de diversification s’observent depuis plusieurs années :

  • Expedia a racheté Trivago, Travelocity et Orbitz ; Priceline a acquis Kayak et Momondo ; et Ctrip (OTA chinoise) a mis la main sur Skyscanner ;
  • Près de 90 % des réservations effectuées sur les principales OTA proviennent de trois groupes : Priceline, Expedia et Ctrip (Source : Euromonitor) ;
  • Booking.com est devenu le principal site de commentaires pour les chambres d’hôtel : 39 %, comparativement à 24,6 % pour TripAdvisor et 3,2 % pour Expedia (Source : Revinate) ;
  • HomeAway a rejoint Expedia, tandis que Booking.com (Priceline) ajoute plus de 600 000 résidences privées à son offre pour concurrencer Airbnb.

Cet environnement fortement concurrentiel fait l’objet d’une désintermédiation, exacerbée par les hôteliers qui mènent de nombreuses initiatives pour encourager les réservations en direct. Aux États-Unis, le volume de ventes en ligne provient majoritairement des sites Web des fournisseurs (61 % en 2016), mais Phocuswright prévoit une hausse de la part de marché des OTA, qui passera de 39 % en 2016 à 41 % en 2020.

4 MODÈLES « DISRUPTIFS » POUR DEMAIN

Les attentes des consommateurs envers la réservation de voyages ne cessent de croître. Ils souhaitent plus de choix, un parcours d’achat fluide, des services personnalisés et des outils qui facilitent l’inspiration. Selon Amadeus, quatre nouveaux modèles centrés sur l’expérience utilisateur sont envisageables d’ici 2020.

OTA + métamoteurs = « mégas agences de voyages en ligne »

D’un côté, les OTA amorcent une transition d’un mode de rémunération basé sur la commission à un modèle publicitaire. Elles tendent ainsi à ne plus être des référents, mais des entreprises qui monétisent le trafic Web grâce à la publicité en ligne. D’un autre côté, la consolidation des OTA et des métamoteurs s’accélère.

La convergence de ces deux changements pourrait donner naissance aux « mégas agences de voyages en ligne », une hybridation entre les OTA et les métamoteurs. Cette stratégie leur octroierait un plus grand pouvoir de négociation face aux prestataires, à moins que le niveau de régulation (sur les plans de la neutralité et de la parité) appliqué dans chaque pays ne se renforce.

Voyagistes traditionnels + OTA = « voyagistes en ligne »

Les voyagistes traditionnels font face à plusieurs défis technologiques : intégrer des outils numériques dans leurs agences physiques, disposer d’un site Web inspirant, proposer des offres flexibles et personnalisées, être actifs sur les réseaux sociaux et accessibles sur les appareils mobiles. De plus, tant pour ces voyagistes que pour les OTA, la demande pour des forfaits dynamiques complexifie le travail.

Si ces deux acteurs fusionnaient afin de devenir l’unique vendeur de voyages, ils pourraient mutualiser leurs efforts et offrir une expérience virtuelle et réelle à leur clientèle. Les agences physiques seraient à la pointe de la technologie et favoriseraient les interactions humaines. Les forfaits sur-mesure pourraient être créés hors ligne et en ligne. En dehors de l’agence, le client pourrait interagir avec un conseiller à partir d’une application mobile. Ce scénario s’est déjà concrétisé puisque Expedia Canada a racheté il y a 10 ans le réseau de franchisés CentredeCroisières et ses 170 points de vente physiques.

Les « agences de voyages mobiles »

Selon Amadeus, il est probable que les appareils mobiles deviennent l’unique canal de distribution, grâce à l’arrivée des « agences de voyages mobiles ». Une application répondrait à tous les besoins du client et serait son seul point de contact avec l’agent. Cela induirait un processus fluide pour effectuer des recherches, s’inspirer et réserver un voyage, à l’aide de diverses fonctionnalités technologiques : reconnaissance vocale, beacons, objets connectés, réalité virtuelle, chatbots, etc.

Réserver un voyage à partir d’une messagerie instantanée est désormais possible. L’OTA chinoise LY.com offre ce service sur WeChat et l’application mobile Lola Travel permet de communiquer directement avec un agent pour la planification et la réservation. Phocuswright confirme cette tendance puisque selon la firme, 40 % des ventes générées sur les OTA seront effectuées avec un appareil mobile en 2020, comparativement à 25 % actuellement.

Quant à Amadeus, il vient de lancer une application mobile « tout-en-un » pour que l’agent de voyage puisse accompagner ses clients du début à la fin. Ces derniers peuvent y réserver eux-mêmes les principales composantes du séjour et l’agent leur envoie ensuite les informations nécessaires à leurs déplacements.

Une « place de marché du voyage »

L’industrie touristique pourrait très bien suivre l’exemple d’Amazon et d’eBay afin de créer sa propre place de marché, c’est-à-dire une plateforme de vente en ligne ouverte aux vendeurs professionnels et aux particuliers. Tous les intermédiaires et les prestataires touristiques, mais aussi les compagnies d’assurances ou encore les entreprises de location d’équipements de voyage, y commercialiseraient leurs offres. Les consommateurs pourraient alors réserver tout ce dont ils ont besoin au même endroit. Les innovations seraient mises en œuvre par le créateur de cette plateforme et non par les fournisseurs, à l’instar d’Amazon qui a lancé récemment Amazon Echo, un assistant personnel à commande vocale.

Néanmoins, les données sur les profils des voyageurs seraient détenues par la place de marché et non par le fournisseur, ce qui empêcherait ce dernier de bien connaître ses clients et de maintenir une relation de qualité avec eux. Ce modèle existe en Chine depuis 2014, année où le géant du commerce en ligne, Alibaba, a créé sa place de marché dédiée aux voyages, Alitrip, rebaptisé depuis Fliggy.

DES MODÈLES D’AFFAIRES EN ÉVOLUTION

Selon LSE Consulting, qui a mené des entrevues auprès de grandes entreprises (notamment Air Canada, IATA, Expedia, Euromonitor, Amadeus, Google et Facebook) pour le compte d’Amadeus, le réseau de distribution a réalisé l’importance des technologies et de la gestion de la relation client. Néanmoins, il sous-estime l’ampleur et la rapidité de la révolution à venir. L’industrie du voyage en ligne est en train de devenir un secteur technologique et de nouveaux entrants font preuve d’innovation pour proposer des expériences clients. Les acteurs en ligne, mais aussi traditionnels doivent à présent appuyer leurs modèles d’affaires sur la collaboration, l’expérimentation, l’innovation et les alliances interprofessionnelles ; conditions pour rester dans le jeu.