Une saison des ouragans explosive, selon AccuWeather

D’après les experts de ce centre d’observation météorologique, toutes les conditions sont réunies pour que 2024 voit naître plusieurs tempêtes et ouragans.


L’équipe de météorologistes experts d’AccuWeather s’attend à une saison des ouragans fort animée, dans l’océan Atlantique, en 2024.

Selon les experts de cette société privée qui fournit des prévisions météorologiques à 175 000 clients dans le monde, jusqu’à 25 tempêtes pourraient se manifester et jusqu’à douze d’entre elles pourraient se transformer en ouragan, cette année. Quatre à six de ces ouragans risquent d’affecter directement les États-Unis.

« Nous croyons que la saison des ouragans de l’Atlantique 2024 présentera un nombre de tempêtes tropicales et d’ouragans bien au-dessus de la moyenne historique », estime Alex DaSilva, principal prévisionniste des ouragans d’AccuWeather. Celui-ci pense même qu’il y a de 10 à 15 % de chances que 2024 compte jusqu’à 30 tempêtes spécifiquement nommées ou plus, cette année. « Dépasser 30 tempêtes battrait le record établi en 2020 », précise l’expert.

 

Une hausse par rapport à 2023

En 2023, 19 tempêtes avaient été nommées dans le bassin de l’Atlantique, bien que seules quatre d’entre elles aient eu des impacts directs aux États-Unis.

Rappelons qu’en août, l’ouragan Idalia a frappé la Floride en tant qu’ouragan de catégorie 3 alors que la tempête tropicale Harold avait inondé le sud du Texas le même mois. La tempête tropicale Ophelia a pour sa part apporté des vents violents et des vagues houleuses en Caroline du Nord en septembre, tandis que Lee a balayé la côte de la Nouvelle-Angleterre en tant que tempête tropicale pluvieuse avant de toucher terre en Nouvelle-Écosse.

 

Quatre forces motrices en présence

Alex DaSilva explique que quatre forces motrices en place lui font croire à une saison des ouragans superchargée : la hausse des températures océaniques, le passage d’El Niño à la Niña, certains modèles météorologiques d’Afrique ainsi que le changement de position et de force des vents de direction.

 

  • Des températures océaniques hors normes

Les eaux chaudes peuvent agir comme un combustible pour que les systèmes tropicaux se renforcent rapidement en ouragans puissants et destructeurs, comme on a pu le constater avec la tempête Otis, devenue ouragan en moins de 24 heures et semant la destruction sur Acapulco, l’an dernier, sur la côte Pacifique.

 

« Or, les températures de surface de la mer sont bien au-dessus de la moyenne historique dans une grande partie du bassin de l’Atlantique, surtout dans le golfe du Mexique, les Caraïbes et la région de développement principale des ouragans », constate Alex DaSilva.

Le météorologiste en chef d’AccuWeather, Jon Porter, estime pour sa part qu’il est très probable que les températures de surface de la mer restent bien au-dessus de la moyenne historique, dans l’océan Atlantique, et ce tout au long de la saison des ouragans 2024.

« Les températures moyennes récentes de l’eau sont les plus élevées observées si tôt dans la saison, poursuit Jon Porter. C’est très préoccupant compte tenu du fait que cette partie de l’océan Atlantique est l’endroit où plus de 80 % des tempêtes se forment pour devenir des tempêtes tropicales ou des ouragans. »

Les températures de l’eau observées ce mois-ci dans le bassin de l’Atlantique étaient aussi chaudes, voire plus chaudes qu’en mars 2005 et en mars 2020, deux années marquées par des ouragans catastrophiques aux États-Unis.

Les eaux anormalement chaudes pourraient également favoriser la formation de systèmes tropicaux avant le début officiel de la saison des ouragans, le 1er juin. Des eaux chaudes persistantes à l’automne risquent également de contribuer à l’essor de tempêtes tropicales en novembre, lorsque l’activité tend généralement à se calmer. La saison des ouragans se termine officiellement le 30 novembre.

 

  • D’El Niño à La Niña

Un changement en cours dans l’océan Pacifique pourrait avoir des implications majeures sur l’activité tropicale à des milliers de kilomètres de là, dans l’océan Atlantique.

Les eaux situées près de l’équateur, dans l’est du Pacifique, devraient passer d’un schéma El Niño à un schéma La Niña, d’ici le milieu ou la fin de l’été.

Pendant un phénomène El Niño, les eaux de l’est du Pacifique sont plus chaudes que la moyenne historique; durant La Niña, les températures de surface de la mer dans l’est du Pacifique sont plus fraîches que la moyenne historique.

Selon Alex DaSilva, La Niña conduit souvent à des vents moins perturbateurs (des « cisaillement du vent ») sur la plupart du bassin de l’Atlantique. La combinaison d’un moindre cisaillement du vent et d’eau plus chaude crée des conditions optimales pour le développement d’un système tropical. « Plus la transition vers La Niña se produit rapidement, plus la saison des ouragans risque d’être active », explique Alex DaSilva.

 

  • Des modèles météorologiques en Afrique

La transition attendue vers La Niña devrait aussi favoriser un courant jet (jet stream) oriental africain plus fort, ce qui peut renforcer la mousson africaine et favoriser davantage de périodes d’air sec se déplaçant hors du continent africain, entravant potentiellement le développement tropical au début de la saison des ouragans.

Les météorologistes experts d’AccuWeather estiment qu’un courant jet africain plus fort pourrait entraîner des ondes tropicales plus robustes plus tard dans la saison, créant ainsi des opportunités supplémentaires pour la formation de tempêtes tropicales.

 

  • Changements de position et de force des vents de direction

La force, l’orientation et la position de l’anticyclone des Açores (ou des Bermudes) peuvent également avoir une influence majeure sur la formation des tempêtes tropicales et des ouragans. Or, cet anticyclone (zone de haute pression) pourrait être décalé plus au sud et à l’est par rapport à la moyenne historique, en raison des températures de surface de la mer plus chaudes.

Conséquemment, des systèmes tropicaux pourraient naître dans l’ouest de l’Atlantique lorsque la haute pression est plus faible, et une autre période de tempêtes atteignant les Caraïbes et le golfe du Mexique sont susceptibles d’apparaître lorsque la haute pression est plus forte.

 

Influence des changements climatiques

Outre les schémas météorologiques et les signes précurseurs pointant vers une saison des ouragans surchargée, les météorologistes d’AccuWeather croient que les impacts des changements climatiques augmentent les chances de conséquences dévastatrices.

« Nous ne voyons pas encore de relation entre le réchauffement climatique mondial et le nombre total de tempêtes, l’augmentation que nous observons se situant surtout dans l’intensité des tempêtes, dit le météorologiste en chef d’AccuWeather, Brett Anderson.

« Le réchauffement des océans provoque également une élévation du niveau des mers car le volume de l’eau augmente avec la montée des températures, poursuit-il. L’expansion thermique, combinée à la fonte des glaciers terrestres due au changement climatique, entraîne une augmentation constante du niveau de la mer, surtout le long de certaines parties de la côte est des États-Unis. Un même ouragan touchant la côte, en termes de force et de trajectoire avec une marée similaire, produira significativement plus d’inondations côtières le long des zones exposées, par rapport à une tempête il y a 30 à 50 ans. »

 

Plusieurs régions confrontées à un risque d’ouragan accru

Selon les experts d’AccuWeather, la côte du Texas, le Panhandle floridien, le sud de la Floride et les Carolines courent un risque plus élevé que la moyenne de subir des impacts directs durant cette saison. « Tous les résidents de la côte des États-Unis, y compris Porto Rico et les îles Vierges, devraient avoir un plan d’ouragan en place et être toujours pleinement préparés à subir un impact direct », conclut Alex DaSilva.