Crédit: NOAA/Associated Press

Vers une autre saison agitée des ouragans?

Les prévisions de la NOAA pour 2025 annoncent entre 13 et 19 tempêtes nommées, dont six à dix pourraient devenir des ouragans


Avec des eaux océaniques toujours plus chaudes que la normale, les prévisionnistes s’attendent à une nouvelle saison des ouragans inhabituellement active dans l’Atlantique.

Mais ils ne pensent pas qu’elle sera aussi chaotique que celle de 2024, la troisième plus coûteuse jamais enregistrée, celle qui a vu naître les redoutables tempêtes Beryl, Helene et Milton.

Jeudi, la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) a dévoilé ses prévisions pour la saison des ouragans dans l’Atlantique, qui commence officiellement le 1er juin et se termine à la fin novembre. Elle estime qu’il y a 60 % de chances que la saison soit au-dessus de la normale, 30 % de chances qu’elle soit proche de la normale, et seulement 10 % qu’elle soit plus calme que la moyenne.

 

Jusqu’à 10 ouragans potentiels

Les prévisions annoncent ainsi entre 13 et 19 tempêtes nommées, dont six à dix pourraient devenir des ouragans, et trois à cinq qui pourraient atteindre le statut d’ouragans majeurs, avec des vents dépassant les 177 km/h.

Une saison normale comprend 14 tempêtes nommées, dont sept deviennent des ouragans, et trois se renforcent davantage pour devenir des ouragans majeurs.

La température des océans, bien que légèrement inférieure à la chaleur exceptionnelle de l’an dernier, reste suffisamment élevée pour être la principale raison de cette prévision active, dit Ken Graham, directeur du National Weather Service.

« Tout est en place pour une saison au-dessus de la moyenne », a-t-il affirmé.

 

La tornade Elon Musk

Malgré les importantes suppressions de postes à la NOAA par le Département de l’Efficacité Gouvernementale (le tristement célèbre DOGE d’Elon Musk), « notre capacité à servir ce pays n’a jamais été aussi bonne, et ce sera encore le cas cette année », a tenu à rappeler Graham lors d’une conférence de presse à Gretna, en Louisiane, pour commémorer le 20e anniversaire de l’ouragan Katrina.

« Le centre des ouragans est entièrement fourni en personnel et nous sommes prêts », d’ajouter Laura Grimm, administratrice par intérim de la NOAA. « Nous en faisons une priorité absolue pour cette administration. »

Depuis 1995, 21 des 30 saisons d’ouragans dans l’Atlantique ont officiellement été classées comme étant au-dessus de la normale, dont près de la moitié qualifiées d’« hyperactives », selon la NOAA. L’agence classe les saisons selon leur indice ACE (Accumulated Cyclone Energy), qui prend en compte le nombre, la puissance et la durée des tempêtes. Au cours des 10 dernières années, seule la saison 2015 a été inférieure à la normale, tandis que celle de 2022 a été proche de la moyenne.

 

Une année 2024 hyperactive

L’an dernier a commencé avec Beryl, ouragan de catégorie 5 formé de manière record en début de saison, puis un calme relatif s’est installé pendant la période habituellement la plus active, de mi-août à mi-octobre.

Mais ensuite, six tempêtes, dont Helene et Milton, se sont formées en l’espace de deux semaines. Avec 18 tempêtes nommées, dont 11 sont devenues des ouragans et cinq des ouragans majeurs, 2024 a été considérée comme une saison hyperactive. C’était la troisième saison de ce type en 10 ans.

« Avec un climat qui se réchauffe, parier sur une activité au-dessus de la moyenne à long terme est toujours une valeur sûre », a déclaré Kristen Corbosiero, professeure de météorologie tropicale à l’Université d’Albany, qui n’a pas participé aux recherches de la NOAA.

Selon l’experte et d’autres de ses collègues, le changement climatique d’origine humaine rend les tempêtes généralement plus intenses, plus humides et plus lentes, ce qui augmente les précipitations.

« La principale source d’énergie pour les ouragans, ce sont les eaux chaudes des océans », a expliqué Kristen Corbosiero. « Des océans plus chauds et une atmosphère plus chaude au-dessus peuvent contenir plus d’humidité — donc plus de carburant pour les tempêtes. »

Elle a précisé que trois facteurs principaux influencent la saison : la température de l’eau, le cycle El Niño/La Niña (réchauffement et refroidissement naturel de l’océan) et les « germes » de tempêtes provenant d’Afrique sous forme d’orages. La chaleur anormale des eaux favorise une saison active, le cycle El Niño est actuellement neutre, et il est encore trop tôt pour savoir ce qui viendra d’Afrique, de dire Kristen Corbosiero et d’autres spécialistes.

 

Des ouragans qui grandissent vite

Avec le changement climatique, les ouragans se renforcent beaucoup plus rapidement, passant de tempêtes quasi inexistantes à des ouragans intenses en peu de temps, ce qui laisse moins de temps pour s’y préparer, ont averti les météorologues. Chaque ouragan de catégorie 5 ayant frappé les États-Unis était encore une simple tempête tropicale ou moins trois jours plus tôt, a souligné Ken Graham.

Plusieurs autres groupes — publics, privés et universitaires — ont déjà publié leurs prévisions pour la saison à venir, et la moyenne indique une année active mais pas hyperactive, avec environ 16 tempêtes nommées, dont huit deviendraient des ouragans et quatre des ouragans majeurs.

Phil Klotzbach, qui coordonne le programme de prévision pionnier de l’Université du Colorado, prévoit un peu plus que les autres : 17 tempêtes nommées, neuf ouragans et quatre ouragans majeurs, en se basant principalement sur la chaleur des eaux et les tendances passées. Il estime toutefois que la saison ne devrait pas être aussi extrême que celle de l’an dernier.

 

Des propos (et un océan) un peu tempérés

« Au moins, nous ne faisons pas face à un Atlantique follement chaud comme c’était le cas l’an dernier à la même période », a-t-il dit. « Mais les températures restent élevées. Donc je ne suis pas tout à fait rassuré pour 2025. »

Même si l’année est calme, Kristen Corbosiero a rappelé qu’une seule tempête peut tout changer, citant 1992, une année très calme, marquée néanmoins par le dévastateur ouragan Andrew.

« Il n’est pas nécessaire d’avoir une saison hyperactive pour connaître la dévastation aux États-Unis, dans les Caraïbes ou ailleurs », a-t-elle conclu.