Croisières d’expédition : comment bien les vendre ?

Avec le retour en force des voyages et des croisières, on s’aventure de plus en plus loin, et on paie de plus en plus cher pour s’évader, y compris en mer. Petit guide pour bien vendre ce produit haut de gamme et lucratif qu’est la croisière d’expédition.


Si les voyages au Canada, qui ont atteint leur apogée pendant les premières années de la pandémie, ont fort diminué (80 % moins de requêtes pour des destinations en Amérique du Nord sur Kayak), les recherches pour les tarifs aériens internationaux sont en hausse de 45 %, d’une année sur l’autre.

Un récent sondage du moteur de recherche Skyscanner révèle ainsi que 27 % des Canadiens interrogés prévoient prendre trois périodes de vacances ou plus en 2024, contre 17 % en 2023. Ce n’est pas tout : ils comptent également dépenser davantage, avec 35 % des répondants qui envisagent augmenter leur budget voyage cette année.

Tout ce qui précède crée des conditions idéales pour que les croisières d’expédition continuent leur croissance en 2024, malgré leur caractère encore relativement nouveau. Selon une récente enquête de Allianz Partners auprès de conseillers en voyages, plus de 75 % des réservations récemment effectuées visaient les croisières, et en particulier les croisières d’expédition – un marché où le taux de retour est par ailleurs élevé, la plupart des passagers exprimant le désir de réserver une autre croisière du même genre, après en avoir essayé une.

Cependant, la vente des croisières d’expédition présente certains défis. Tout d’abord, elles ne sont pas spécialement abordables, notamment lorsqu’elles se déroulent dans certaines des destinations les plus éloignées du monde. En outre, leur volet « aventure » ne convient pas à tout le monde, à commencer par ceux qui ne veulent rien d’autre que se détendre, s’offrir des repas gastronomiques ou s’amuser à bord.

 

L’AVIS DES EXPERTS

Alors, comment les conseillers en voyages peuvent-ils vendre des croisières d’expédition au bon client? Nous avons posé la question à quelques experts, dont Caroline Hay, directrice générale des croisières chez Trevello Travel Group.

« D’abord, il est primordial de cerner les besoins de chaque client en lui posant des questions spécifiques sur ce qu’il veut comme expérience, dit la spécialiste. Cela garantit que les recommandations seront adaptées à ses désirs et besoins. Les croisières d’expédition varient considérablement en termes de compagnies et de navires, et grâce à ces questions, on est en mesure de trouver la croisière qui correspond le mieux aux besoins individuels du croisiériste. Il ne s’agit pas seulement de vendre une croisière; il s’agit aussi de créer une expérience qui correspond à ce que le client recherche ».

Cheri Ozimac, conceptrice senior de voyages chez Tully Luxury Travel, estime pour sa part que les croisières d’expédition, qui accueillent généralement moins de 200 passagers à bord, conviennent parfaitement à ceux qui n’apprécient pas les gros paquebots, qui ont déjà beaucoup voyagé et qui veulent maintenant découvrir des lieux plus reculés.

« Ce sont des destinations de rêve qui conviennent aussi aux voyageurs actifs car ces séjours proposent des activités comme la randonnée ou le kayak, par exemple. Mais il est important de noter que l’activité physique n’est pas une exigence – au minimum, le croisiériste doit simplement être capable de monter à bord d’un zodiac et d’escalader quelques marches ».

 

QU’EST-CE QU’UNE CROISIÈRE D’EXPÉDITION ?

Comme son nom l’indique, la croisière d’expédition se déroule généralement en lieu éloigné comme l’Antarctique, les régions polaires ou les Galapagos. Selon Caroline Hay, les navires d’expédition peuvent cependant être déployés partout dans le monde, même si elle observe « une certaine croissance dans des régions telles que le Pacifique Sud, l’Afrique, l’Alaska et les Caraïbes ».

Si ces croisières permettent de naviguer dans des régions moins fréquentées, c’est qu’elles utilisent des navires plus petits et plus intimes qui transportent de 16 à 250 passagers. En plus de l’aventure et de l’exploration, elles touchent également à l’éducation et à la sensibilisation, parfois à l’environnement; plusieurs compagnies de croisières d’expédition incluent d’ailleurs une équipe d’experts dans des domaines tels que la biologie marine, la conservation et la photographie à bord, pour donner des conférences et améliorer l’expérience des invités.

 

QUE RECHERCHENT LES CROISIÉRISTES D’EXPÉDITION ?

Pour Cheri Ozimac, ils veulent tous la même chose : « Des excursions sur la terre ferme pour se balader, des guides expérimentés et, surtout, la sécurité, dit-elle. Nos clients de luxe veulent tout cela, mais avec le confort d’une croisière de luxe ».

Caroline Hay abonde en ce sens, tout en ajoutant que les croisiéristes d’expédition veulent aussi de bons services et commodités à bord ainsi que des excursions à terre « qui améliorent leur expérience des destinations éloignées de façon durable et responsable », constate-t-elle.

Les passagers recherchent également « des opportunités éducatives intimes pour en apprendre davantage sur les régions qu’ils visitent, des rencontres de proximité avec la faune et des activités qui respectent l’écologie et la culture locales ».

 

COMMENT COMPARER DES COMPAGNIES DE CROISIÈRES D’EXPÉDITION ?

Un nombre croissant de compagnies de croisières proposent des croisières d’expédition, dont Lindblad Expeditions, HX (Hurtigruten Expeditions), Silversea, PONANT, Atlas Ocean Voyages, Viking et bien d’autres.

Plusieurs fréquentent les mêmes lieux reculés et promettent des aventures et des expériences hors du commun. Alors comment un conseiller en voyages peut-il comparer une compagnie de croisières à une autre ?

« Pour ce faire, il faut vérifier l’histoire de la compagnie de croisière dans la région visée, combien de guides et de naturalistes sont à bord, et ce qui est inclus ou pas dans le voyage, comme des parkas, des pantalons et des bottes, avance Cheri Ozimac. Les conseillers devraient également suivre les formations proposées par les compagnies de croisières et, si possible, partir en croisière eux-mêmes, car rien ne vaut la connaissance du produit en l’expérimentant soi-même ».

La formation est donc la clé, confirme Caroline Hay, qui suggère de commencer par se familiariser avec les principaux acteurs du segment des croisières d’expédition et en apprendre plus sur les endroits où ils naviguent.

« Ensuite, il faut contacter le BDM/responsables des ventes pour savoir ce qui est tendance et ce qui se vend le mieux sur le marché canadien, poursuit l’experte. Les conseillers en voyages doivent passer du temps à comprendre tout ce qui est inclus ou pas dans une croisière, mais aussi les destinations, la disponibilité des guides d’expédition et les restrictions géographiques ».

 

QUELLES COMPAGNIES DE CROISIÈRES RECOMMANDER ?

Lorsqu’on lui demande quelles sont ses trois compagnies de croisières d’expédition préférées, Cheri Ozimac va plus loin en recommandant trois navires.

« Le Silversea Silver Endeavor, le Seabourn Venture et Le Commandant Charcot de PONANT proposent tous des croisières d’expédition haut de gamme et tout compris, dit-elle. J’ai navigué à bord du Silver Endeavor en Antarctique et j’ai absolument adoré la taille du navire et ses suites. La nôtre disposait d’un balcon chauffé et la gastronomie à bord était délectable. Mais ce que j’ai aimé le plus, c’est l’équipe d’expédition qui s’est toujours assurée que nous débarquions sans tracas, et qui disposait d’un plan d’urgence si la météo ne coopérait pas ».

Caroline Hay dit quant à elle qu’il lui est impossible de choisir, en ajoutant qu’elle connaît au moins 15 entreprises différentes qui sont spécialisées dans les croisières d’expédition, et que chacune offre des expériences distinctes et adaptées à des goûts et des préférences variés.

« La croissance des croisières d’expédition au cours des dernières années me rappelle la croissance observée il y a plus de 20 ans sur le marché des croisières fluviales, dit-elle. Cette montée en popularité a abouti à une large gamme d’options, ce qui a rendu les croisières d’expédition plus accessibles à une gamme plus large de clients. Recommander une entreprise plutôt qu’une autre peut donc s’avérer une tâche difficile ».

 

DERNIERS CONSEILS

En croisière d’expédition, les passagers en ont vraiment pour leur argent, et c’est pourquoi le prix des séjours est souvent si élevé. « Ceux qui manifestent un intérêt pour ce type de croisière en sont généralement conscients, et l’objectif principal du conseiller en voyages est donc de les aider à trouver les croisières idéales qui correspondront à leurs attentes et à leurs capacités financières », dit Caroline Hay.

Cela dit, au lieu de justifier le coût élevé des croisières d’expédition, les conseillers devraient écouter attentivement les désirs et exigences de leurs clients, puis les orienter vers les options les plus adaptées à leur budget, croit l’experte.

« Cette orientation peut nécessiter d’envisager des remises pour réservation anticipée, des forfaits tout compris, des réservations de groupe, des périodes de voyage en basse saison, des promotions spéciales et des itinéraires personnalisés, le tout dans le but de les aider à tirer le meilleur parti de leur croisière tout en restant dans leurs limites financières », ajoute-t-elle.

Pour faire économiser ses clients, Cheri Ozimac recommande pour sa part de réserver une croisière d’expédition pendant la basse saison, comme novembre pour l’Antarctique, et de vérifier les promotions.

Mais son conseil n°1 pour les croisiéristes d’expédition consiste surtout à « ne pas trop dépenser pour la cabine, car on n’y passe finalement que peu de temps, insiste-t-elle. Tout le monde a plutôt envie d’être sur le pont pour voir les deux côtés du navire et admirer tous ces paysages magnifiques », conclut-elle.