Convoqués en comité parlementaire vendredi dernier, les PDG de plusieurs transporteurs veulent inciter le gouvernement fédéral à revoir ses politiques.
Les dirigeants des compagnies aériennes canadiennes, sous pression en raison des frais pour les bagages de cabine, affirment que le gouvernement fédéral doit réformer le système d’aviation du pays si on veut rendre les voyages plus abordables.
Vendredi dernier, les PDG d’Air Canada et de WestJet ont ainsi comparu devant un comité parlementaire des transports, de l’infrastructure et des collectivités pour répondre aux questions concernant leurs récentes décisions d’introduire des frais pour les bagages de cabine des voyageurs. Air Transat et Porter Airlines ont également témoigné
Air Canada et WestJet dans la mire
Les dirigeants ont fait face à des questions difficiles de la part des parlementaires, qui les avaient convoqués après l’annonce d’Air Canada, plus tôt ce mois-ci. Cette dernière indiquait que les clients payant un tarif de base ne pourraient apporter qu’un article personnel et devraient payer pour enregistrer un bagage de cabine.
Cette décision d’Air Canada fait suite à une mesure similaire prise par WestJet, qui a introduit une classe tarifaire UltraBasic ne permettant aux passagers d’emporter qu’un sac d’ordinateur portable ou un petit sac à dos à bord.
Ces évolutions s’inscrivent dans une tendance croissante du secteur aérien où les compagnies dépendent de plus en plus des frais annexes pour des services auparavant inclus, allant des bagages enregistrés aux collations et à l’accès au Wi-Fi à bord.
Des voyages de plus en plus coûteux
Les membres du comité ont interpellé les PDG sur ces frais supplémentaires, arguant qu’elles rendent les voyages aériens de plus en plus inabordables pour les Canadiens.
« Pensez-vous vraiment que cela est acceptable à un moment où les Canadiens ont des difficultés financières? » a demandé le député libéral Angelo Iacono.
Un autre député libéral, Vance Badawey, a demandé à WestJet — qui n’a pas à divulguer ses informations financières en tant qu’entreprise privée — d’ouvrir ses livres et de révéler ses marges bénéficiaires.
« Parce qu’au bout du compte, c’est la raison pour laquelle nous sommes ici aujourd’hui, d’ajouter Vance Badawey. Nous sommes ici pour l’abordabilité des tarifs pour passagers. »
Plus de catégories tarifaires, moins de coûts
Mais les dirigeants des compagnies aériennes ont déclaré qu’en offrant aux passagers un choix de catégories tarifaires avec différents niveaux de service, ils contribuent à rendre les voyages moins chers pour les Canadiens.
« Nous sommes probablement tous d’accord sur le fait que la concurrence est la meilleure façon d’assurer le meilleur service et les meilleurs prix pour les Canadiens, de dire Michael Rousseau, PDG d’Air Canada. Elle permet aux clients de comparer les produits et au marché de décider ce qui réussira. »
« Nous devons nous assurer que nos tarifs sont comparables à ceux de nos concurrents tout en offrant aux voyageurs la flexibilité de payer uniquement pour les services qu’ils apprécient », de poursuivre le PDG.
Le PDG de WestJet, Alexis von Hoensbroech, a quant à lui déclaré que 1,2 million de Canadiens ont choisi la classe tarifaire UltraBasic depuis son introduction en juin, ce qui a permis de réduire les coûts de voyage puisque ce tarif est en moyenne 14 % moins cher que l’option tarifaire suivante de WestJet.
« Ce sont des économies importantes à un moment où nous faisons face à une crise d’abordabilité, a Alex von Hoensbroech lors d’une entrevue vendredi matin. Je pense donc que nous faisons quelque chose de bien… Et je comprends la perception qui existe, mais il est aussi important de révéler tous les faits. »
Des politiques et des frais tiers à revoir?
Alex Von Hoensbroech a ajouté qu’il est facile pour les politiciens de « critiquer les compagnies aériennes » parce que la crise de l’abordabilité est réelle. Mais selon lui, si le gouvernement fédéral veut réellement réduire les coûts des voyages aériens, des réformes importantes du système sont nécessaires.
Il a ainsi déclaré que les voyages aériens au Canada figurent parmi les plus coûteux au monde, en partie à cause des politiques gouvernementales et des frais tiers. Les frais de navigation, les frais de sécurité, les frais d’amélioration des aéroports et autres taxes peuvent ajouter jusqu’à 100 $ au prix d’un billet, a précisé le PDG.
Il a appelé le gouvernement à geler les augmentations des frais et charges tiers pour permettre au secteur de l’aviation canadienne d’être compétitif à l’échelle mondiale.
Il a également demandé au gouvernement fédéral de cesser de facturer un loyer aux aéroports pour les terrains qu’ils occupent, ce qui permettrait aux aéroports de réinvestir ces fonds dans les infrastructures et les services.
Qui paiera la note finale?
Gabor Lukacs, président de l’association Air Passenger Rights et bien connu pour défendre les droits des passagers au pays, a quant à lui dire craindre que les contribuables finissent par payer la facture si le gouvernement décide de geler les montants que les voyageurs aériens paient pour des services comme la navigation et la sécurité.
« Il n’y a pas de repas gratuit, dit-il. Pour ces dirigeants d’entreprises aériennes qui disent que certains de ces frais devraient être réduits, je me demande plutôt, en tant que passager, qui va payer pour tout ça au bout du compte? »
La ministre fédérale des Transports, Anita Anand, a également exprimé son mécontentement face aux frais pour les bagages de cabine. Lors d’une entrevue vendredi, elle a affirmé avoir discuté de la question avec certains dirigeants des compagnies aériennes plus tôt cette semaine.
« J’ai souligné l’importance de tenir compte du fait que les Canadiens travaillent fort et économisent pour voyager, et ils s’attendent à un excellent service, pas à des frais supplémentaires », a-t-elle dit.
« J’ai aussi spécifiquement abordé l’importance de la transparence et de la responsabilité avec les PDG d’Air Canada et de WestJet. »
Avec la Presse Canadienne et des informations de Christopher Reynolds.