Comment bien conseiller ses clients à l’heure de la tendance anti-voyage?

22 janvier 2021 — En 2020 et pendant la saison hivernale actuelle, les voyages n’ont pas été complètement à l’arrêt pour tout le monde. Certains professionnels et voyageurs continuent de vouloir voyager malgré tout.  Sans oublier qu’il existe toujours des déplacements pour des raisons essentielles! Dans ce contexte, comment se positionnent les conseillers en voyages face à leurs clients ? Si depuis quelques jours, on observe un élan de fermetures volontaires d’agences de voyages, d’autres sont pour l’instant toujours prêtes à faire voyager leur clients s’ils en ont besoin. 

Voyager par temps de pandémie, c’est encore possible. Mais pour voyager, il faut se munir de grandes précautions et informations. Les voyageurs ont pu parfois subir, pendant les fêtes et encore récemment, la tendance de l’anti-voyage, ou travel shaming. Une réelle pression sociale, de vives critiques à l’égard du voyage se sont développées, souvent via les réseaux sociaux. Que l’on soit pour ou contre le voyage, il faut admettre que la situation actuelle ne rend pas la tâche facile pour les agents de voyages, qui doivent pour certains encore travailler malgré tout, tout en prenant soin d’avertir les clients et de leur éviter des conséquences négatives. Voici quelques conseils, inspirés de témoignages de conseillères et voyagistes, afin de guider vos clients. L’objectif : leur faire passer des vacances sécuritaires et sereines dans un contexte changeant et complexe.

(Les propos suivants ont été recueillis avant le 22 janvier dernier, donc avant les récentes annonces du gouvernement Canadien visant à quasiment interdire les voyages.)

1. Informer, informer, et informer! 

Cela va sans dire, le rôle d’un conseiller en voyages est de… conseiller ; mais durant cette période très sensible et compliquée, il faut cette fois transmettre une triple dose d’informations officielles avant de laisser partir un client à l’étranger. 

 

Brigitte Viel, Conseillère en voyages chez Exotentik Voyages, déclare à la rédaction de Profession Voyages : 

“Ma conscience professionnelle me dicte de référer les gens sur le site du gouvernement afin de s’informer sur les avis au niveau des voyages. Il est très important de voyager en connaissance de causePar exemple, lors de la planification d’un séjour en Afrique ou en Amérique du Sud, je fais la même recommandation car il y a présence fièvre jaune . Notre rôle est de les référer à consulter les sites officiels. Je l’ai toujours fait et donc je continue de le faire aujourd’hui pour la Covid. ”

 

Adréane Laroche, Propriétaire et conseillère en voyages chez Voyages Belaro, est du même avis et va même un peu plus loin : “Chaque fois qu’il y a eu une vente de voyages (très peu nombreuses) nous avons fait lire un documents de conditions d’environ 6 pages aux clients. Ceci explique en long et en large les risques du voyage, les mesures prises et nos recommandations pour un voyage Covid responsable.”

Pascale Déry, Directrice des Relations avec les médias pour Air Canada, insiste sur l’évolution constante et rapide des mesures : “Il faut s’assurer de voyager en ayant la bonne documentation et en toute connaissance de cause. Il est important de continuer d’informer les voyageurs sur les réglementations, car elles peuvent changer et évoluer très souvent.

2. Avoir une conscience sociale 

Partir en voyage, et aujourd’hui plus que jamais, est une responsabilité. Une responsabilité pour nous-mêmes, et pour les autres. 

Brigitte nous dit : “C’est un partage de responsabilité. Une transaction responsable que l’on fait. Avant d’arriver à une vente, le processus est plus long. Je suis là pour partager mon expérience et expertise et pour répondre aux questions. S’ils ne m’en posent pas, je suis inquiète!”

Cependant, ce n’est pas parce que le voyage est possible, qu’il est nécessaire ou essentiel. Il faut savoir faire des choix et les assumer :

“Quand je voyage, j’ai une image à protéger, en tant que conseillère mais aussi en tant que Canadienne. Si j’entache mon image de Canadienne c’est d’autres Canadiens que j’entache en même temps. Je ne peux pas voyager de la même façon qu’auparavant. J’ai annulé certains voyages par conscience sociale et professionnelle”, déclare Brigitte.

 

 

Andréane Laroche : “Nous ne promouvons pas la vente des voyages en disant que c’est moins dangereux sur place, et nous expliquons les vraies choses.”

3. La sécurité avant tout 

Voyager est une responsabilité et il est important d’appliquer toutes les consignes et les protocoles de santé : ceux qui nous sont donnés dans notre pays, mais aussi dans le pays où l’on séjourne. L’essentiel est de s’assurer que le client connaisse les consignes et s’engage à les respecter, pour ne pas s’attirer des soucis à destination. 

Brigitte Viel conseille également à ses clients d’avoir une assurance voyage, pour être prêts à toute éventualité. “Nous avons des droits et des devoirs.. Et je donne des devoirs à faire à mes clients avant leur départ.”

Pascale Déry d’Air Canada insiste sur la sécurité en vol, qui est optimale aujourd’hui : “Il faut aussi rassurer les voyageurs et leur dire qu’ils voyagent en toute sécurité. Nous avons un programme SoinPropre+ très complet qui leur permet d’être en sécurité dans l’avion. De plus, nous savons que les voyages sont responsables de moins de 2% des contaminations Covid, d’après un rapport de Santé publique Canada.”

Brigitte ajoute, à la lueur des annonces faites ces derniers jours : “en ce moment je suis plus une « déconseillère en voyage »… ce n’est vraiment pas un bon moment pour sortir du pays et aller se balader à l’international. Trop d’incertitude quand au mesures qui pourraient être mises en place aux frais des voyageurs à leur retour.”

4. Faire profil bas sur les réseaux sociaux 

Lorsque l’on a un profil sur les réseaux et que l’on commence à publier du contenu… On se retrouve exposé aux yeux de tous, et si certaines personnes sont bienveillantes, d’autres le sont parfois moins. 

L’exposition médiatique n’a pas attendu la pandémie pour exister, mais le souci est qu’aujourd’hui, elle est encore plus présente (et plus vicieuse!).

Andréane nous confie : “Nous avons effectivement eu des clients qui ont abandonné l’idée de voyager, pas par crainte du voyage mais bien de se faire crucifier sur la place publique. J’ai moi-même abandonné l’idée de partir en janvier tel que convenu… j’attends que les choses se calment, car je veux pouvoir parler de mon expérience sans gros jugement.” 

Afin d’éviter cela, vous pouvez conseiller à votre client de bien connaître son auditoire, comme nous l’a suggéré Brigitte. “Qui regarde mes réseaux?” est la question à se poser avant de partager des moments de vie sur internet, afin d’adapter et bien sélectionner ce que l’on souhaite montrer ou non.

Ensuite, Brigitte déclare à notre rédaction qu’elle conseille à ses clients de faire “low profile” sur les réseaux. Il n’est pas question de se cacher ou de calculer nos moindres faits et gestes, mais d’agir discrètement. Et puis, se détacher des réseaux permettra de mieux profiter! 

En effet, Andréane rejoint Brigitte sur ce point : “Je n’ai pas eu de clients qui m’ont mentionné une telle chose [un jugement anti-voyage] mais je sais que ceux-ci se sont montrés très discrets sur les réseaux sociaux.”

Au contraire, Moscou Côté, Président de l’Association des Agents de Voyages du Québec, déclare à Richard Martineau durant une entrevue à QUB Radio : “Il y a une grosse travel bashing, on a vu ça surtout début janvier. Les gens revenaient de voyage et il y avait des menaces sur Facebook à leur égard.”
Il insiste également sur le fait que même si certains effectuent des voyages pouvant être évités, d’autres voyagent pour des raisons essentielles : “Il ne faut pas mettre tout le monde dans le même panier.”

5. Assumer… Ou reporter!

Comme nous l’avons noté plus haut, rien ne sert d’angoisser et de trop réfléchir, au risque de ne pas apprécier le voyage, qu’il soit non-essentiel ou essentiel. Voyager reste un choix personnel.

Brigitte insiste : “Certains ont annulé, sur MA recommandation. Car je savais qu’ils n’allaient pas pouvoir supporter la pression sociale. Je les sentais inquiets donc je préférais qu’ils annulent. Il vaut mieux reporter que partir en vacances craintif et ne pas profiter. La destination va demeurer là, on peut reporter.”

Brigitte nous informe qu’elle n’a eu que de bons retours de la part de ses clients, qui n’ont pas subi de critiques pendant ou après leurs vacances.

Source: Eloïse Petit pour Profession Voyages.